La transition numérique, un levier de la transition écologique ?

Télécom SudParis

Alors que la Fondation Mines-Télécom lance son nouveau cycle de veille dédié à l'Impact du numérique sur l'environnement, le lien entre « Numérique » et « Environnement » ouvre toujours plus de questions. Avec « Energy4Climate », l’Institut Polytechnique de Paris prend le défi de la transition énergétique à bras le corps. Aux côtés d’enseignants-chercheurs de 25 laboratoires, Télécom SudParis s’y implique fortement. Michel Marot, Professeur à Télécom SudParis, membre du comité de direction d’E4C (Energy for climat) nous présente ce programme.

 

La formation M. et D. des leaders des énergies de demain

Energy4Climate (E4C) est un grand centre pluridisciplinaire de recherche portant sur la transition énergétique. Il a été récemment créé par les 5 Écoles fondatrices de l’Institut Polytechnique de Paris en juin 2019.

Lauréat d’une EUR (Ecole Universitaire de Recherche), Energy4Climate propose un enseignement de référence pour former les leaders des énergies de demain. Plusieurs parcours, autour de l’ingénierie et de l’entrepreneuriat, sont proposés aux étudiants de niveau master et doctorat. L’enseignement est adossé à la recherche : ces deux volets sont ainsi fortement imbriqués.

La transition énergétique a son centre pluridisciplinaire

Avec 25 laboratoires1, Energy4Climate couvre, de près ou de loin, toutes les disciplines de l'énergie et du climat. On y retrouve entre autres des physiciens et des chimistes qui s’intéressent au stockage de l'énergie ou travaillent sur les panneaux photovoltaïques, des climatologues et des météorologues, des mathématiciens et des économistes qui s'intéressent à l'analyse des données liés aux réseaux d'énergie, et d'autres comme nous, qui travaillent sur les systèmes d'information, les réseaux de télécommunication et la sécurité.

Certains travaux de recherche donnent lieu à des rapports en vue d'alimenter les décisions prises par les Politiques. Philippe Drobinski, Directeur-fondateur d’E4C, est un membre actif du GIEC. E4C est un vaste ensemble, tant en termes de laboratoires, que de personnels, que de disciplines, qui s'intéresse au changement climatique et à la transition énergétique.

 

Les diplômés impliqués sur le terrain et dans les projets

E4C rassemble également un écosystème économique assez vaste. En plus des chercheurs, les entreprises, en particulier les réseaux d'alumni des écoles, sont parties prenantes. « Avec les diplômés, très impliqués sur le terrain, on peut interagir. Nombre d'entreprises partenaires, historiquement engagées auprès des écoles, montent des projets liés à l'énergie avec nous. » explique Michel Marot.

La construction du bâtiment Bachelor installé sur le campus de l’Ecole Polytechnique a été financé par Total. « Ce bâtiment est conçu pour analyser les dépenses d'énergie, observer les comportements des usagers, mais aussi pour impliquer les étudiants au travers de projets d’observation, de mesure, de conception et d’optimisation de systèmes énergétiques. » énumère Michel Marot.

 

Les technologies du numérique pour la transition énergétique

Dans ce vaste ensemble, les enseignants-chercheurs de Télécom SudParis apportent leur expertise des technologies numériques. « Prenons l'exemple du réseau électrique. Un système renouvelable comme l'éolien ou le photovoltaïque est par nature une source d'énergie intermittente. Comment coordonner ces sources d'énergie, qui produisent… quand elles produisent, et les consommateurs, les coordonner encore avec d'autres entités comme le stockage ou avec le Grid (c-a-d le réseau opéré par le fournisseur d'énergie) ? » explique Michel Marot.

« Pour que cela fonctionne, il faut évidemment un système d'information qui remonte les données et un système de pilotage optimal, … bref, des technologies numériques. Cela implique des expertises en réseaux, en sécurité - c'est évidemment fondamental pour s'assurer que l'information n'est pas modifiée ou pour préserver la vie privée. »

 

L’analyse de données au cœur de l’analyse des comportements

Historiquement le secteur des Télécom a développé nombres de modèles pour étudier le comportement des réseaux télécom. « Ces modèles s’appliquent tout naturellement à l'étude des réseaux électriques car, que ce soit des flux d'information ou des flux d'énergie, conceptuellement cela ne change pas grand-chose. » explique Michel. Par ailleurs, pour le traitement et l'exploitation de l'information, on peut être amené à s’intéresser à la nature, au sens de l'information véhiculée. La discipline à laquelle on fait alors appel, l'analyse de données, trouve son application dans les réseaux électriques : mesure de production, de consommation, analyse de comportements.

Essayer d’influer sur des comportements pour les rendre plus économes en énergie requiert d'exploiter toutes ces masses de données. Big data, statistiques, apprentissage automatique sont des domaines pour lesquelles les enseignants-chercheurs de Télécom SudParis ont l’expertise. "Notre légitimité tient à la fois à notre expertise sur tout ce qui est système d'information (SI) au sens large, transport de l'information, traitement, sécurisation, puis également exploitation des données et optimisation."

 

Énergie, télécom et météo, … les experts unissent leurs forces

Pour contribuer à la transition énergétique, les compétences mobilisées sont, par nature, multidisciplinaires, comme l’illustre parfaitement le projet Peper2 labellisé par DATA IA. Comment faire coopérer production, consommation et stockage pour une meilleure utilisation des énergies renouvelables ? Les enseignants-chercheurs de trois disciplines - génie électrique, télécom et météo - ont décidé d’unir leur expertise. Leur but : introduire l'intelligence artificielle dans les systèmes d’information des réseaux électriques pour les rendre viables en les optimisant.

Michel Marot précise : « Il existe aussi une complémentarité opérationnelle puisque les données sont issues de deux sites : le bâtiment DrahiX de l’Ecole Polytechnique et la Maison des Elèves de Télécom SudParis. D’un côté, on mesure la consommation d'un incubateur, c’est-à-dire un bâtiment tertiaire, de l’autre, celle d'un lieu de vie étudiant. Les modes de consommation sont radicalement différents. »

Le contexte est également important. Les recherches ont besoin d'un contexte spécifique pour être menées : des plates-formes, du matériel, etc. Avec E4C, les fonds rassemblés sont fléchés au bénéfice des études sur la transition énergétique et le changement climatique.

Tout comme pour la formation : « bien qu'elle soit abordée dans toutes les disciplines comme cas d'application, la transition énergétique n'est pas dans le cadre historique de nos enseignements, c'est pourquoi il est très important de s’inscrire dans la mention Énergie de l'école doctorale d'IP Paris. Cela participe à la structuration de notre formation autour de l'énergie. »

1. CEREA (ENPC & EDF), CERMICS (ENPC), CIRED (UMR 8568), CMAP (UMR 7641), CREST (UMR 9194), HM&Co (ENPC), I3 (UMR 9217), IMSIA (UMR 9219), IPSL (FR636), IPVF (UMR 9006), LADHYX (UMR 7646), LCM (UMR 9168), LHSV (ENPC, EDF, CEREMA), LIX (UMR 7161), LMD (UMR 8539), LMS (UMR 7649), LPICM (UMR 7647), LPMC (UMR 7643), LSI (UMR 7642), LSO (UMR 7652), LTCI, SAMOVAR (UMR 5157), UCP (ENSTA), U2IS (ENSTA), UMA (ENSTA)

2. Florence Ossart, professeure au Laboratoire de Génie Electrique de Paris (CNRS, CentraleSupélec, Université Paris-Sud, Sorbonne Université), Hossam Afifi, professeur à Télécom SudParis et Jordi Badosa, chef de projet à l’École polytechnique au sein du Laboratoire de Météorologie Dynamique (CNRS, École polytechnique, ENS Paris-Saclay, Sorbonne Université)

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